Mouhammed Ibn Ismail Al-Boukhary
L’Imâm Al-Bukhârî :La Citadelle du Hadith
L’Imâm des musulmans, l’Exemple des pieux, le Savant du Hadîth et la Référence des savants, Abû `Abd Allâh Muhammad Ibn Ismâ`îl Ibn Ibrâhîm Ibn Al-Mughîrah Ibn Bardizbah, surnommé Al-Bukhâri, en référence à sa ville natale, Bukhârah.
Sa jeunesse et le début de son apprentissage
L’Imâm Al-Bukhâri naquit en 194 AH, à Bukhârah, dans la région de Khorasân. Le père de l’Imâm Al-Bukhârî, un homme aisé, mourut alors que son fils était très jeune et c’est son épouse qui prit le plus grand soin de l’éducation de leur fils orphelin. Ahmad Ibn Al-Fadl Al-Balkhî rapporte au sujet de l’Imâm Al-Bukhârî : « Dans son enfance, il perdit la vue. [Un jour], sa mère vit le prophète Ibrahîm — que la paix soit sur lui — dans un rêve ; il lui annonça la bonne nouvelle : « Dieu a rendu la vue à ton fils grâce à tes nombreuses prières et invocations ». » Ainsi Dieu exauça les prières de sa mère et l’Imâm recouvrit sa vue.
Avide de science et doué d’une mémoire exceptionnelle, il commença à étudier les hadîths à l’âge de onze ans en mémorisant la compilation de hadîths de Ibn Al-Mubârak (soufi et grand juriste de son temps). Il finit la mémorisation du Coran avant l’âge de seize ans. On relate que dans sa jeunesse il connaissait déjà par c½ur soixante-dix mille hadiths de notre prophète Muhammad — paix et bénédictions sur lui.
À l’âge de seize ans, après avoir appris le Hadîth par les spécialistes de cette science à Bukhârah, il voyagea avec sa mère et s’installèrent à la Mecque. Pendant leur séjour, il étudia le Hadith par d’éminents savants de la Mecque, notamment Al-Humaydî qui lui enseigna aussi la jurisprudence de l’Imâm Ash-Shâfi`î. À l’âge de 18 ans, il écrivit son premier livre sur les compagnons du prophète Muhammad — paix et bénédictions sur lui — et les successeurs (la génération qui suivit celle des compagnons), qu’Allâh les agrée.
Il dit à Abû Ja`far Ibn Muhammad Abû Hâtim Al-Warrâq : « J’ai étudié les livres d’Ibn Al-Mubârak et Wakî` et je connaissais déjà leurs écrits par c½ur à l’âge de seize ans. A dix-huit ans, j’ai commencé à compiler les comportements et les paroles des Compagnons et des Successeurs [en arabe : at-tâbi`ûn]. C’était au temps de `Ubayd Allah Ibn Mûsâ. J’ai rédigé Kitâb At-Târîkh [i.e. Le livre d’Histoire] près de la tombe du Prophète — paix et bénédictions sur lui — les nuits de lune. [...] ».
Abondance de son savoir
Dans l’espoir d’acquérir le savoir et de compiler des hadiths exacts (ou intègres) [en arabe : sahîh], il parcourut la terre à la recherche des savants du hadîth. Il fut le disciple de nombreux savants de la Mecque, de Médine, de Damas, de `Asqalân, de Hims, du Caire, de Baghdâd, de Bassora, de Kûfah et de nombreuses autres villes. Il acquit le savoir en compagnie de savants tels que : l’Imâm Ahmad Ibn Hanbal, Abu `Âsim An-Nabîl, Muhammad Ibn `Îsa At-Tabbâ` et Ishâq Ibn Mansûr. Parmi ses disciples, nous pouvons citer plusieurs grands noms comme : Muslim, Abû Zur`ah, Abû Hâtim, At-Tirmidhî, Al-Marwazî, Sâlih Ibn Muhammad Jazarah, Ibn Khuzaymah, As-Sarrâj.
Dieu dota l’Imâm d’une mémoire exceptionnelle et sa contribution aux sciences du Hadîth est sans pareil. `Abd Ar-Rahmân Ibn Muhammad Al-Bukhâri rapporte qu’il entendit Muhammad Ibn Ismâ`îl dire : « J’ai rencontré plus de mille hommes [de science] du Hidjâz [en Arabie] , Iraq, Syrie, Egypte et Khorasân » et il poursuivit jusqu’à ce qu’il dit : « Ils soutenaient sans exception le principe stipulant : « La Religion repose sur des actes et des paroles, et le Coran est la Parole d’Allah ». »
Ibn `Adiyy dit : « Un nombre de savants apprirent qu’Al-Bukhâri serait prochainement de passage à Baghdâd. Ils choisirent cent hadiths dont ils brouillèrent les chaînes de transmission et les textes, donnant ainsi à chaque Hadîth une chaîne de transmission autre que la sienne. Chaque savant prit dix de ces hadiths et s’apprêta à mettre Al-Bukhâri à l’épreuve durant leur rencontre. Les gens s’assemblèrent et l’un des savants confronta Al-Bukhâri avec le premier de ses dix hadîths. Il répliqua « Je ne le connais pas ». Le savant lui cita un autre hadîth. Il répondit « Je ne le connais pas. » et ainsi de suite jusqu’au dixième hadîth. Les gens avertis [initiés à la science du hadith] parmi l’audience se regardèrent et dirent : « L’homme s’y connaît. », les autres pensèrent que c’est un ignorant. Puis un autre savant exposa à son tour ses dix hadîths, puis un autre, jusqu’au centième hadîth et Al-Bukhâri répondait invariablement « Je ne le connais pas. ». Quand il vit qu’ils avaient terminé, il se retourna vers le premier savant et dit « La chaîne authentique de ton premier hadîth est ceci, celle de ton deuxième hadîth est ainsi etc. » Il fit de même avec le deuxième savant, puis le troisième, et il poursuivit avec chacun d’eux jusqu’au centième hadîth. À ce moment, tout le monde eut la certitude qu’il était un Hâfidh [i.e. ils reconnurent la qualité de sa mémorisation]. »
Al-Warrâq dit « j’ai entendu Sâlim Ibn Mujâhid dire : « Je rendais visite à Muhammad Ibn Sallâm Al-Bikandî et il me dit : « Si tu étais venu plus tôt, tu aurais vu un garçon qui connaît par c½ur soixante-dix mille hadîths. ». Je suis sorti à sa recherche. Lorsque je l’ai trouvé, je demandais « Est-ce toi qui dit connaître par c½ur soixante-dix mille hadîths ? », il [i.e. Al-Bukhâri] répondit « Oui, et plus encore, et jamais je ne te citerai un hadîth d’un Compagnon ou un Successeur sans que je sache la date et le lieu de leur naissance et de leur mort, et là où ils vécurent. Et je ne narre [de leurs hadîths] que ce qui est certain et fondé sur un principe de la religion de Dieu, dans le Livre de Dieu et La Sunnah de Son Messager ». Ainsi Al-Bukhâri fut non seulement un muhaddith d’exception [un spécialiste du Hadith] mais également un grand juriste (faqîh). D’ailleurs Al-Khozâ`i dit : « Al-Bukhâri est le faqîh de cette Ummah » (faqih signifie spécialiste en jurisprudence.)
Ibn `Adiyy dit : Muhammad Ibn Al-Qumîsi me rapporta : j’ai entendu Muhammad Ibn Hamdawayh dire : j’ai entendu Muhammad Ibn Ismâ`îl [Al-Bukhâri] dire : « je connais par c½ur cent mille hadîths intègres [i.e. hadîth sahîh] et 200 000 hadîths d’authenticité questionnable. »
Témoignages des savants à son sujet
Les témoignages faits au sujet de la science de l’Imâm et de ses qualités sont très nombreux. Nous nous contenterons ici de quelques exemples :
L’Imâm Ibn Khuzaymah dit : « Je n’ai vu sur terre plus savant en Hadîth que Muhammad Ibn Ismâ`îl Al-Bukhâri ».
Muhammad Bashshâr disait : ”Les sommités en terme de mémorisation sont au nombre de quatre sur terre : Abû Zur`ah à Rayy, Muslim à Naysabûr, `Abd Allah Ad-Dârimî à Samarqand et Muhammad Ibn Ismâ`îl à Khorasân.”
Qutaybah Ibn Sa`îd dit à son sujet : ”Il était à son époque ce que `Omar fut parmi les Compagnons, et si Muhammad Ibn Ismâ`îl vivait du temps des compagnons, il aurait été un phare. (ayah).”
Al-Khozâ`î dit : « Al-Bukhâri est le faqîh de cette Ummah ».
Piété et adoration
Il fut l’exemple du dévot et du savant éprouvant une crainte révérencielle envers Allah. C’est l’homme aux prières nombreuses et au c½ur recueilli et éveillé. Pendant le mois du ramadan, il récitait le Noble Coran en entier dans la journée, et un tiers du Coran avant l’aube tous les jours.
Al-Farabarî dit : Muhammad Ibn Ismâ`îl m’a dit « Je n’ai jamais écrit un hadîth dans le Sahih [son livre Sahîh Al-Bukhâri] sans avoir effectué al-ghusl [ablutions majeures](?) et prié deux rak`ah au préalable. »
Al-Warrâq rapporte : « Pendant mes voyages avec Abû `Abd Allâh, lorsqu’il arrivait que nous dormions dans la même maison, je le voyais se lever la nuit entre quinze et vingt fois. Chaque fois, il allumait sa lampe et il extrayait des hadîths en les annotant. Puis il s’allongeait de nouveau. A l’approche de l’aube, il avait l’habitude de prier trente rak`ah [2 par 2] et il ne me réveillait jamais. Je lui dis une fois : « Tu endures cela pour toi-même, pourquoi ne me réveilles-tu pas aussi [pour prier] ? Il répondit : « Tu es un homme jeune et je n’aime pas troubler ton sommeil. ». »
Son livre Al-Djâmi` As-Sahîh
L’Imâm rédigea différents ouvrages de hadîths. Dans son livre Al-Djâmi` As-Sahîh [littéralement : ”La Somme Authentique”], après un examen minutieux et rigoureux, il enregistra des paroles du Prophète — paix et bénédictions sur lui — dont la chaîne de transmission ne se compose que de transmetteurs justes et fiables, sans défaut ni brisure. Pendant seize ans, il scruta 600 000 hadîths et retint 7 275 hadîths dont l’authenticité est au-delà du moindre doute.
Dans l’étude des chaînes de transmission, il ne disait jamais d’un homme
« c’est un menteur!», il disait « telle personne l’a démenti », « telle personne l’a traité de menteur », « non digne de confiance ». Lorsqu’ Al-Bukhâri qualifiait un homme de « non digne de confiance », il ne narrait pas de hadîth de lui.
Il y a un consensus parmi tous les savants de l’Islam au sujet de l’abondance exceptionnelle de son savoir, ses bonnes manières, son caractère noble et généreux. Son livre précieux Al-Djâmi` As-Sahîh est la meilleure référence de tous les temps en matière de hadîths authentiques.
La Citadelle du Hadîth, le maître des muhaddithînes, le Rempart des sciences de la tradition, le flambeau de la communauté, l’exemple du pieux, l’Imâm de l’Islam, Abû `Abd Allâh Al-Bukhâri retourna auprès d’Allah en 256 AH, à Samarqand (v. d’Ouzbékistan, Asie centrale). Qu’Allah le récompense pour ce qu’il fit et ce qu’il fut pour l’islam et qu’Il lui fasse miséricorde. Âmîn.
Source : islamophile.org
Complèment d’information tiré de son livre le Sahih
Parmi ses principales oeuvres on compte 26 ouvrages faisant des dizaines de volumes...
Il y a par exemple At Tarikh Al Kabir (La Grande Histoire,il ya aussi ”la moyenne” et la ”petite” histoire), Kitab Al Hiba, Bir Al Walidayn(bonté envers les parents), As Sunan fi Al Fiqh ,il y en a encore beaucoup...
Voici quelque témoignages sur Al Bokhary:
”Khorosan n’a pas donné de pareil”(Ahmed)
”Al Bokhary n’a pas connu d’égal en son temps”(Ali Ben Al Madiniy)
”Je ne connais pas d’homme semblable à lui”(Ali ben Majar)
”Cela n’est qu’une goutte d’eau dans la mer:Si nous avions demandé les éloges des oulamas(savants) sur (Al Bokhary), nous n’aurions pas terminé(de les citer)”(Ibn Khatir)
Al Bokhary dit: ”Chaque hadith écrit dans le livre du Sahih,je ne l’y ai porté qu’après avoir fait mes ablutions et prié deux rak’a...J’ai disposé dans le ” ad djami’ ” six cent mille hadiths en seize ans (de recherche) pour le prendre comme un argument qui me sauverait du châtiment de Dieu...J’ai disposé la composition la composition de mon livre ”ad djami’” dans la Mosquée Sacrée . Chaque hadith inclus ne l’a été fait qu’après que j’ai fait la prière d’istikhara(consultation), deux rak’a et que je me suis assuré de son authenticité...”
Quand à Abou Jafar Mahmoud Ben Amrou Al Ouqayly, il dit : ”Quand Al Bokhary avait fini la rédaction du Sahih, il le présenta à l’imam Ahmed Ben Hanbal, à Yahya Ben Mou’in, à Ali ben Al madiniy et d’autres ( que Dieu les agrée tous) afin qu’ils émettent leur avis. Le résultat fut concluant: ils avaient approuvé le Sahih dans sa totalité à l’exception de quatre hadith, Al Bokhary avait aussi raison”
Source :Sahih Al Bokhary volume 1 Edition Al Maktaba Al asriyah
Il a rendu un ”service” inestimable aux Musulmans...et dire que beaucoup ne savent même pas qui il était...
Ceux qui ont lu et sont arrivés jusqu’à la fin ne pourront pas dire ”je ne savais pas” il rapporte les enseignements du Prophète (as) ne pas connaître Bokhary c’est ne pas connaître le Prophète ou en tout c’est être dans la complète ignorance sur une partie de la vie de Notre Prophète, je dis une partie parce qu’il ya d’autres historiens qui ont autant de prestige que lui mais l’oeuvre de Bokhary est originale car il a posé des conditions et utilisé des techniques afin de valider tel ou tel récit historique,c’est ce qui fait de lui une réference incontournable pour celles et ceux qui souhaitent étudier l’Islam et le Vrai...
Qu’Allah le récompense et le fasse entrer au Paradis ! Amin!
Autre biographie :
L’imâm Al-Boukhârî (que Dieu lui accorde Sa miséricorde)
Après les compagnons du Prophète , l’imâm Al-Boukhârî fait partie des plus éminents pieux personnages ayant contribué à l’essor de l’Islam. Ce qui justifie ce statut est le recueil d’un ensemble de ahâdîth prophétiques authentiques qu’il a compilé sous le titre de
« Al-Jâmi’ al-mousnad as-sahîh al-moukhtasar min oumoûri rasoûli-Lâhi salla-Lâhou ‘alayhi wasallam wa sounanihi wa ayyâmih » (الجامع المسند الصحيح المختصر من أمور رسول الله صلى الله عليه وسلم وسننه وأيَّامه) plus connu sous le nom « Sahîh Al-Boukhârî ». Cet ouvrage est unanimement reconnu comme la plus authentique référence islamique après le Saint Coran. Tant que les musulmans étudieront leur religion, le souvenir de cet illustre spécialiste du hadîth ne s’estompera pas. Aussi, s’arrêter sur sa biographie est une occasion de découvrir le parcours incroyable d’un homme de cœur, persévérant et exigent dans son labeur, mais remarquablement humble pour quelqu’un de sa stature.
Son enfance
Le nom complet de ce grand savant est Aboû ‘Abdillâh Mouhammad Ibnou Ismâ’îl Ibnou Al-Moughîra Ibnou Al-Ja’fî Al-Boukhârî. Il vit le jour le 13 Chawwâl de l’an 194 H (810 ap. J-C.) à Boukhârâ, ville de l’actuel Ouzbékistan. Son père quitta ce monde alors qu’il était encore jeune enfant. Il fut donc élevé par sa pieuse et courageuse mère qui passa par une épreuve difficile : Al-Boukhârî perdit la vue. Il fut examiné par de célèbres médecins de son époque, mais leur traitement resta inefficace. L’amour maternel poussa la pieuse femme à prier son Seigneur sans relâche pour que son fils recouvre l’usage de ses yeux. Une nuit, elle visita en rêve le prophète Ibrâhîm (paix et salut sur lui) qui lui annonça : « Allâh a rendu la vue à ton fils grâce à l’intensité et à la beauté de tes invocations. » Au petit matin, la gratitude pouvait se lire dans les yeux du garçon…
Ses débuts dans le hadîth
C’est à l’âge de dix ans qu’Allâh imprégna le cœur d’Al-Boukhârî de l’amour du hadîth. Son père était un mouhaddith (traditionniste) : il avait rencontré Hammâd Ibnou Zayd, ‘Abdoullâh Ibnou Al-Moubârak et Mâlik Ibnou Anas dont il transmettait des paroles du Prophète . Al-Boukhârî intégra la classe de hadîths de sa ville, où il étudia ardemment. L’année suivante, sa mémorisation des textes et des chaînes de transmission atteignit une telle précision qu’il lui arrivait de corriger ses professeurs. Ses compétences et sa vivacité d’esprit lui permirent, à l’âge de seize ans, de connaître par cœur les ouvrages de ‘Abdoullâh Ibnou Al-Moubârak, Al-Waki’ et d’autres érudits condisciples de l’imâm Aboû Hanîfa.
Ses voyages
Son premier voyage fut le pèlerinage à La Mecque à dix-huit ans, effectué en compagnie de sa mère et de son frère aîné. Après avoir accomplit leur devoir religieux, le frère et la mère rebroussèrent chemin, tandis qu’Al-Boukhârî séjourna sur le lieu saint pour approfondir ses connaissances, et écrire une biographie des compagnons du Prophète et des pieux prédécesseurs, intitulé « Qadâyâ as-Sahâba wat-Tâbi’în ».
À Médine, assis près de la tombe du Prophète au clair de lune, il compila le célèbre recueil sur les transmetteurs « At-Târîkh Al-Kabîr ». À cette époque, le visage du jeune prodige ne témoignait d’aucune marque de pilosité.
Guidé par une motivation sans pareille, l’imâm Al-Boukhârî se rendit dans des contrées lointaines pour acquérir la transmission des ahâdîth. Cet éloignement de plusieurs années lui permit d’enregistrer une myriade de connaissances. Il dit lui-même : « Pour rechercher le savoir, j’ai voyagé en Egypte, en Syrie et en Arabie ; je suis allé à Bassora quatre fois, j’ai passé six ans dans le Hijâz et je me suis rendu à Koufa et à Baghdâd à plusieurs reprises, toujours accompagné par des spécialistes de la parole prophétique. »
Des facultés extraordinaires
L’incroyable mémoire dont jouit l’imâm Al-Boukhârî est la caractéristique qui le démarquait de tous les autres spécialistes du hadîth et redonnait vie à celle d’Aboû Hourayrâ (grand compagnon du Prophète qui a rapporté le plus de récits sur lui). Hachid Ibnou Ismâ’îl attestait de ce don extraordinaire : « L’imâm Al-Boukhârî nous accompagnait à Bassora pour écouter les ahâdîth de la bouche des savants. Nous écrivions tous ce que nous entendions, excepté Al-Boukhârî. Seize jours s’étaient écoulés lorsque nous lui reprochâmes cette négligence qui avait engendré tant de gâchis. Il nous demanda alors d’apporter nos notes. Les ayant en main, il se mit à réciter par cœur plus de 15000 ahâdîth, nous permettant ainsi de corriger ceux que nous avions répertoriés. »
Mouhammad Ibnou Azhar As-Sijistânî témoignait également : « J’allais chez Soulaymân Ibnou Harb en compagnie de l’imâm Al-Boukhârî pour écouter les ahâdîth. J’écrivais ce que j’entendais, contrairement à mon pair. Quelqu’un m’interpella :
” - Pourquoi Al-Boukhârî ne prend aucune note ?
- Si tu manquais à écrire un hadîth, Al-Boukhârî pourrait te le restituer de mémoire.” »
N’importe quel quidam ne peut se targuer d’être doté d’une telle faculté d’esprit ! Allâh donne à qui Il veut, et élève en savoir qui Il veut.
Une lecture suffisait à Al-Boukhârî pour retenir ce qui l’intéressait du contenu d’un livre. Au début de son apprentissage, il avait déjà mémorisé 70000 hadîths puis, avec l’âge, ce chiffre atteignit 300000, dont 100000 étaient authentiques (sahîh), et 200000 relevaient d’autres degrés d’authenticité (hassan, da’if, …). Un jour, alors qu’il se trouvait à Balkh (ville historique d’Afghanistan), les habitants le sollicitèrent pour réciter un hadîth de chacun de ses professeurs : il déclama ainsi 1000 hadîths, chacun se rapportant à un de ses enseignants.
À l’occasion de la venue d’Al-Boukhârî à Baghdâd, les traditionnistes locaux décidèrent de le tester en intervertissant les textes et les chaînes de transmission d’une centaine de hadîths, et en impliquant dans la manigance autant de personnes pour les énoncer. À l’arrivée du grand imâm, un rassemblement eut lieu en son honneur, comptant les savants, les nantis et la population. Un homme se leva, conformément au plan élaboré, et posa une question sur un hadîth falsifié. Une autre personne fit de même, et ainsi de suite jusqu’à la centième. Bien évidemment, l’imâm Al-Boukhârî n’avait jamais entendu ces combinaisons entre les paroles prophétiques et les chaines de transmission associées ; il se mit à les corriger une à une en s’adressant à leurs auteurs respectifs : admirative, l’audience reconnut la supériorité de ce savant exceptionnel.
Ses écrits
« Sahîh Al-Boukhârî » est le fruit d’une connaissance profonde des ahâdîth et de leurs chaînes de transmission. La compilation de ce recueil a duré seize ans : Al-Boukhârî n’y ajoutait aucun hadîth s’il n’avait pas fait ses ablutions et accomplit la prière de consultation auparavant. Ce livre compte plus de 7200 ahâdîth, tous authentiques. Il existe plus de 80 commentaires de cette œuvre, mais le meilleur reste celui d’Al-Hâfidh Ahmad Ibnou ‘Alî Ibnou Hajar Al-Asqalânî Aboû Al-Fadhl (mort en 852 H/1449 de l’ère chrétienne), qui fut achevé en 25 années.
Les compétences d’Al-Boukhârî ne se limitaient pas à ce domaine de prédilection : il était à la fois exégète, linguiste, juriste et il n’a pas manqué de consigner ces différentes connaissances.
Ses professeurs et ses élèves
Al-Boukhârî a rencontré plusieurs « tabi’ tabi’înes » (les suivants des successeurs pieux), et il eut plus de mille professeurs, dont Ahmad Ibnou Hanbal. Ibnou Hajar Al-‘Asqalânî détaille les différentes catégories d’enseignants :
- ceux qui rapportent d’après les tabi’înes, comme Mouhammad ‘Abdoullah Al-Ansârî.
- Ceux qui vécurent à l’époque des tabi’înes mais n’ont pas rapporté d’eux.
- Ceux qui ont appris chez les grands élèves des tabi’înes à l’instar d’Ibnou Hanbal.
- Ceux qui font partie de sa génération, ou encore certains de ses élèves.
Ses leçons attiraient beaucoup d’érudits : l’imâm Ibnou ‘Îssâ At-Tirmidhî (210 H - 279 H), Aboû Daoûd (230 H - 316 H) et l’imâm Aboû Al-Houssayn Mouslim (204 H - 261 H) faisaient partie de ses disciples.
Quelques traits de son caractère
Al-Boukhârî était réputé pour son contentement et le respect de la parole donnée. A sa mort, le père d’Al-Boukhârî laissa une grande fortune à sa famille ; Al-Boukhârî disposa d’une bonne partie de cette richesse. Il utilisait son argent sur la base du partenariat silencieux : il fournissait l’échoppe où travaillait son associé, et les profits étaient équitablement partagés. Un jour, un commerçant lui proposa d’acheter des biens pour 5000 dirhams, Al-Boukhârî lui demanda de revenir le lendemain. Le soir, un autre groupe de commerçants lui offrit 10000 dirhams pour ces mêmes biens. Il leur dit : « J’ai déjà convenu d’un arrangement avec quelqu’un d’autre, je ne veux pas changer mon intention pour 10000 dirhams ».
Le docte répondait à ses propres besoins. Il travaillait dur et, même s’il disposait d’une grande richesse, ne disposait que d’un nombre raisonnable de domestiques. Son attitude respirait la modestie et la simplicité : Mouhammad Ibnou Hâtim Al-Warrâq, un de ses disciples, avait illustré ce code de conduite par ces propos : « Al-Boukhârî construisait un petit hôtel dans la banlieue de Boukhâra ; il plaçait les briques lui-même. Je lui dis :
- ”Laisse-moi le faire à ta place.
- Le Jour du jugement, cette action me sera bénéfique” me répondit-il. »
Sa générosité allait de pair avec son dévouement. Il lui arrivait de faire don de 3000 dirhams en une journée. Al-Warrâq mentionna même qu’Al-Boukhârî dépensait toute sa paie (500 dirhams) pour ses étudiants.
Les désirs de ce bas monde ne trouvaient guère de place dans le cœur de l’imâm Al-Boukhârî ; l’ascétisme était son vêtement. Durant sa quête du savoir, il se contentait de deux ou trois amandes par jour… Lorsqu’il fut touché par la maladie, les médecins lui signifièrent qu’elle découlait de la sécheresse de son alimentation, ce qu’il réfuta puisqu’il n’avait jamais eu de souci de santé en quarante ans.
Le comportement de l’imâm Al-Boukhârî était empreint d’une grande piété, mêlée de crainte révérencielle d’Allâh . Sa vigilance quant à la médisance et à la suspicion s’avérait sans faille. La colère était bannie de son tempérament et il ne réprimandait personne en public. Il accomplissait beaucoup de prières surérogatoires et jeûnait fréquemment. Durant le mois de Ramadan, il terminait quotidiennement la lecture du Saint Coran.
Ce catalogue des vertus de l’érudit n’est pas exhaustif : ce n’est là que les grandes lignes de sa personnalité mises en lumière.
L’incident de Nichapour
En l’an 250 H, Al-Boukhârî, se rendit à Nichapour (Neysaboûr), dans la province iranienne du Khorâsan pour y dispenser des cours. Cependant, certains cheikhs enviant sa réputation et sa popularité, répandirent une rumeur laissant penser que le grand traditionniste prétendait ceci : « Ma parole, en récitant le Coran, est créée » ; ce ouï-dire impulsa un mouvement contestataire à son égard. Un homme l’interpella lors d’un ses cours : « Ô Abâ ’Abdillâh, que dis-tu des paroles lors de la récitation du Coran, sont-elles créées ou non créées ? ». L’imâm de Boukhârâ ne donna aucune réponse, mais face à l’obstination de son interlocuteur, il répliqua alors : « Le Coran est la Parole de Dieu, les actes des hommes sont créés... » ; et l’individu d’incriminer le savant de reconnaître « que sa parole, en récitant le Coran, [était] créée ». Mouhammad Ibnou Yahya Ad-Dhouhalî en profita pour proscrire aux gens la fréquentation des assises d’Al-Boukhârî en prétextant que cela cautionnait sa position. Avant de retourner dans sa ville natale, Al-Boukhârî manifesta sa volonté de rétablir la vérité en apportant un éclaircissement à ses affirmations: « Celui qui, de Nichapour, prétend que j’ai dit que ma parole, en récitant le Coran, était créée, celui-là est un menteur. Je n’ai pas dit cela ; cependant j’ai dit que les actes des hommes étaient créés. »
Al-Boukhârî et l’émir de Boukhârâ
À son retour, Al-Boukhârî fut visité par un envoyé de l’émir Khâlid Ibn Ahmad Az-Zuhalî : le prince l’invitait à lire ses ouvrages « Al-Jâmi’ » et « At-Târîkh » à ses fils. Il était hors de question pour l’imâm de se déplacer au palais, aussi déclara-t-il : « Dis-lui que je ne me permets pas de rabaisser la science ni de la porter devant les portes des sultans. S’il en a quelque besoin, il n’a qu’à venir dans mon oratoire ou chez moi. Et, si cela ne lui plaît pas, il est un sultan et il peut m’interdire de professer. [J’espère] que cela me soit une excuse devant Dieu le jour de la Résurrection… »
Suite à cette réplique, Al-Boukhârî fut calomnié, persécuté et même exilé. Mais l’injustice ne saurait rester impunie : un mois ne s’était écoulé que le gouverneur s’est vu destitué de ses fonctions, ainsi que tous ses séides.
Sa mort
L’imâm Al-Boukhârî fut rappelé par son Seigneur le premier jour du mois de Chawwâl de l’an 256 H (870 ap. J.-C.). Il repose à Khartank, un village près de Samarkand. Que Dieu lui accorde Sa miséricorde ! Son travail a marqué l’histoire des sciences du hadîth et constitue une aide précieuse pour les musulmans, désireux de perpétuer le souvenir du Prophète jusqu’à la fin des temps.